Communiqué de presse 19 décembre 2019
Démarrage du projet européen COMMON: Vers la création d’un réseau inédit de gestion et de suivi côtier pour le traitement des déchets marins en Méditerranée
Le 19 décembre 2019 l’Institut National des Sciences et Technologies de la Mer de Tunis lance le projet COMMON avec une réunion d’information à Monastir réunissant les autorités locales, les ONG environnementales, les scientifiques et la presse afin de présenter le projet, ses objectifs et de discuter le rôle de la coopération des différents acteurs dans le cadre de la gestion intégrée.
Le projet COMMON, (COastal Management and MOnitoring Network for tackling marine litter in Mediterranean sea), financé par l’Union Européenne dans le cadre du programme de coopération transfrontalière en Méditerranée ENI CBC MED et coordonné par l’ONG italienne Legambiente, est doté d’un budget de 2,2 millions d’euros et vise à créer une plateforme pour la gestion intégrée des déchets marins en Méditerranée. Ce projet réunit l’Institut National des Sciences et Technologies de la Mer (Tunisie), l’Université de Sienne (Italie), l’Institut Agronomique Méditerranéen de Bari (Italie), l’ONG environnementale Amwaj (Liban), l’Université de Sousse (Tunisie) et le parc naturel de Tyr (Liban).
De nos jours, la pollution marine est reconnue comme un problème de pollution global, en particulier dans le bassin Méditerranéen. Cependant, l’impact de cette pollution dans les parties sud et est de la Méditerranée est moins connu. En outre, il devient de plus en plus évident qu’il est nécessaire de réagir collectivement pour traiter les déchets marins avec une approche intégrée, dans laquelle les différents acteurs scientifiques, politiques et la société civile peuvent travailler ensemble et de manière coordonnée.
Un objectif commun: lutter contre les déchets marins en appliquant les principes de la gestion intégrée des zones côtières (GIZC) dans cinq zones pilotes: deux en Italie (Maremme et Pouilles), deux en Tunisie (îles Kuriat et Monastir) et une au Liban (Tyr) afin de développer l’utilisation et le suivi des ressources et de promouvoir une approche participative efficace associant les parties prenantes et les communautés locales, avec l’ambition de tester un modèle éventuellement transférable dans tout le bassin méditerranéen.
COMMON se propose d’améliorer la sensibilisation du public sur la question des déchets marins, de développer des activités de formation et de renforcer des capacités pour les autorités locales et régionales, les aires marines protégées, les centres de sauvetage des tortues marines et les citoyens en général. Il activera des campagnes de sensibilisation et des activités de mise en réseau, impliquera les communautés locales et les opérateurs économiques à intégrer la gestion et l’élimination des déchets marins suivant l’approche de la GIZC.
Compte tenu de la nature des environnements marins, non isolés du contexte environnant, les problèmes liés à la mer ne peuvent être abordés qu’au niveau de la communauté et avec une approche multipartite.
“Les déchets marins ont été détectés dans le monde entier dans tous les principaux habitats marins, dans des tailles allant du microns aux mètres, en particulier dans les environnements marins et côtiers des mers semi-fermées, comme la mer Méditerranée. Ils ont des répercussions sur tous les aspects de la vie humaine. Cependant, leur impact n’est ni évalué ni totalement compris“, a déclaré Dr. Sana Ben Ismail, coordinatrice du projet COMMON au sein de l’INSTM. «Pour faire face à cette urgence, il est nécessaire, d’une part, d’acquérir de nouvelles connaissances sur le sujet, et d’appuyer les processus décisionnels en matière de prévention et de gestion sur terre d’autre part. Pour cette raison, le projet COMMON vise à étudier des modèles de gouvernance efficaces dans certaines zones pilotes, comme première étape, avant d’aborder le problème au niveau méditerranéen.”
Une des ambitions principales du projet COMMON est la gestion d’un réseau permanent qui assure la coordination des centres de sauvetage des tortues marines afin d’enquêter sur le problème des déchets marins, dans lequel l’Italie, la Tunisie et le Liban sont impliqués en première ligne
Le plastique, roi des déchets marins du littoral tunisien :
En 2016, la Tunisie a généré 0,25 million de tonnes de déchets plastiques, dont 0,05 Mt (20%) ne sont pas collectés et 0,20 Mt (80%) collectés pour le traitement des déchets. Seuls 0,15 Mt (60%) de ces déchets ont été envoyés dans des décharges, contre 0,04 Mt (16%) librement éliminés dans la nature et uniquement 0,01 Mt (4%) ont été recyclés (ANPE, Agence nationale pour la protection de l’environnement).
Les activités humaines sont confirmées comme les principales sources de déchets dispersés en mer: 74,6% des déchets analysés sont d’origine anthropique et seulement 25,4% sont d’origine naturelle.
L’impact des déchets plastiques est néfaste sur la biodiversité : Ils piègent, blessent, ou sont ingérés par des organismes aquatiques. Ils offrent également un moyen de transport pour les espèces exotiques les aidant à atteindre de nouveaux territoires en dehors de leur habitat naturel. Mais le problème le plus important est que les déchets ne disparaissent pas. Ils restent dans l’environnement pendant des décennies et sont fragmentés en morceaux de plus en plus petits, impossible à éliminer et à quantifier: c’est ce qu’on appelle les microplastiques. Ces fragments inférieurs à 5 mm ont un moyen plus facile de passer dans la chaîne alimentaire en la contaminant. Un récent rapport tunisien a souligné, pour la première fois, la présence et l’accumulation de microplastiques dans le contenu gastro-intestinal et la chair du Serran (Serranus scriba), l’un des principaux poissons commercialisés en Tunisie. Les données ont montré la présence d’un niveau élevé de microplastiques dans tous les échantillons examinés.
“L’urgence croissante et la complexité des défis sociaux interconnectés, tels que les déchets marins, doivent être résolues par la consolidation de l’interface entre la science, la politique et la société, en fournissant les conditions nécessaires pour traduire les connaissances issues de la recherche en actions efficaces. L’implication de multiples acteurs et l’adoption d’une plateforme de gestion intégrée des côtes seront au cœur de la recherche de COMMON. En outre, l’impact des déchets ingérés par les organismes marins devrait être évalué par le biais d’une surveillance intégrée, tant des espèces commerciales que des espèces protégées“, a déclaré Monsieur Hechmi Missaoui, professeur à l’INSTM et partenaire du projet COMMON.